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Fin de l'ultime oasis (salon d'écriture 47)
Pour le 47ème salon d'écriture du Partage des mots, Andrée nous propose d'écrire un texte avec au début et à la fin les extraits du livre de Sophie Loubière "L'enfant aux cailloux":
"le jeu du vent et du soleil amusait les rideaux"
"le souffle du feu embrasait les ultimes brindilles".
Le jeu du vent et du soleil amusait les rideaux.* Et je regardais du haut de
mes sept ans le mistral poussant les nuages, le soleil disparaissant derrière eux
puis réapparaissant dans tout son éclat ce qui changeait la tonalité vieux rose
des rideaux qui étaient constamment secoués par la violence du vent.
On avait laissé certaines fenêtres ouvertes malgré ce vent car dehors, la
chaleur était insupportable et la sécheresse de l'air rappelait le désert. Cette
atmosphère que je trouvais angoissante allait me pousser plus tard à rechercher
des lieux verdoyants et humides.
Cela faisait un mois qu'il n'avait pas plus et encore, cela n'avait été qu'un
bref orage qui avait tracé des rigoles dans le sol et avait fait dévaler l'eau de
pluie dans les rues sans résultat satisfaisant pour les plantes assoiffées.
Et en cette fin août, l'herbe était jaunie et rêche, les pins irradiaient la
chaleur comme d'étranges radiateurs pourtant bien inutiles en cet été provençal
et les cigales grésillaient de la joie de sentir cette atmosphère brûlante. Les
volets des maisons demeuraient clos jusqu'au coucher du soleil. Je jouais à
l'intérieur.
Le vent, qui s'était levé dans l'après-midi, rendit l'air moins étouffant mais il
allait aussi orchestrer une vraie tragédie.
A environ un kilomètre de ma maison, dans l'un des rares endroits encore
sauvages de cette région, industrialisée de façon brutale en quelques années, se
dressait une colline. C'était une colline très typique de la région avec ses beaux
rochers blancs et ses étendues de garrigue et de pins d'Alep.
Vers six heures du soir, mon grand frère aperçut le premier un panache de
fumée. C'était la colline qui prenait feu. Je regardais longuement par la fenêtre
que l'on avait du fermer à cause de l'âcreté de la fumée qui arrivait jusqu'à
chez nous.
Ce que je voyais était la destruction, la fin d'un oasis de sauvagerie au milieu
d'une urbanisation anarchique, la fin aussi d'un monde pastoral et intemporel
qui laissait place à ce que l'on appelait alors le progrès et ce que l'on
appellerait plus tard la mondialisation...
J'assistais bientôt aux ballet des canadairs qui expulsaient de gigantesques
quantités d'eau sur la colline mais le feu était plus puissant qu'eux.
Les buissons de chêne kermès et de genêts scorpions s'embrasèrent comme de
l'amadou et les pins prirent feu comme de gigantesques allumettes. Bientôt, le
souffle du feu embrasait les ultimes brindilles.*
* Sophie Loubière
Esclarmonde, le 22/08/2011
Tags : feu, vent, fin, , colline
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Commentaires
J'ai les larmes aux yeux en écrivant
bisous
Joliment tourné
Douce journée
Bisous
timilo
Jonas
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Chaud, devant !