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Errance sans fin
Au pays des terres enchantées où tu avais osé t'aventurer,
Tu a vu passer un chevalier venu d'un lointain passé,
De la contrée du rêve, de l'improbable et du hasard.
Tu as vu de la magie quand tu as croisé son regard.
Ton âme s'est retrouvée piégée dans un océan de paradoxe,
Il s'est levé dans ton coeur une tempête d'équinoxe,
Ce coeur jusque là flétri, s'est abreuvé à cette enivrante folie,
Que le prince t'offrit dans un calice d'émeraude et de rubis.
Tu voulais qu'il t'emmène dans une vallée perdue,
Où officie encore les banshees, les druides et les devins,
Pour s'abreuver éternellement à un nectar divin
Et savourer dans son jardin tous les fruits défendus
Tu voulais goûter à tous ces délectables poisons
Mais l'oracle du raisonnable a sonné du clairon
Et t'as orienté soudain dans un si rectiligne chemin,
Que tu es repartie pour une errance sans fn
Ton coeur et ton âme ont été frappés d'amnésie,
Mis à exécution par le grand prêtre de la raison.
Ta survie en dépendait, ta raison s'échappait à l'infini,
Tu ouvris ton grimoire et barras à l'encre de la soumission :
La beauté, la magie, l'audace, la grâce, l'exaltation,
Mais aussi le drame, la tragédie, la cruauté, le malheur.
Vertige de la passion, recherche du bonheur,
Magie du hasard, féérie de l'émotion.
Et ce vertige que tu as ressenti lorsque tu l'as vu, cette force venue d'ailleurs.
Quand il est passé à côté de toi et qu'il t'a regardé un bref instant.
Cela faisait quelques jours que les forces de la vie remontaient dans ton coeur,
Malgré la pusillanimité qui ne te quittait pas vraiment.
Malgré le fait que tu étais pieds et poings liés, formatée, chaperonnée.
Tu as entrevu un monde où vivent les rebelles et les sauvages,
Des guerriers cherchant éperdument l'absolu et la liberté,
La violence et la folie, la vie et l'amour, la passion et le voyage.
Tout cela est d'une beauté étrange, violente et sacrée.
Mais toi, ce qu'il te faut, c'est du médiocre, de l'à-peu-près,
Du prêt-à-penser stérilisé, mis en boîte ou en sachet.
Vendu comme ultime rêve dans les supermarchés
Tu recherche l'improbable, l'inattendu, l'imprévisible, l'héroïque,
Ce qui est au fond de ton âme, ces pulsions archaïques,
Ce désir venu du fond des âges, cette tempête qui arrache les coeurs,
Mais la fée de la bienséance a choisi de te faire peur.
Tu as finalement embarqué sur le bateau de la raison,
Celui qui devait te ramener au pays des tièdes et des bien-mis.
Il a erré des siècles sur les eaux troubles de la dénégation.
Un jour, il a échoué au pied d'un château hanté par d'étranges esprits.
Ils t'attendaient et te cherchaient depuis une éternité
Tu avais fui ce voyage auquel tu avais aspiré
Et ils t'ont présenté celui que tu croyais avoir renié,
Celui que tu croyais parti vers un monde oublié.
Il était là de nouveau et tout semblait possible :
Une course éperdue vers un royaume inaccessible,
la recherche désespérée d'un trésor bien caché,
Mais le temps a fait son oeuvre car des siècles ont passé.
Il est trop tard pour lui, il est trop tard pour toi,
Le temps de l'innocence file entre vos doigts,
Lui et toi errez à jamais dans un labyrinthe insensé,
où les fils tissés par Ariane ont tous été coupés.
Esclarmonde - avril 2011
Tags : ton, passe, coeur, venu, magie
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