Au bout d'un sentier qui serpente à travers bois, dans une sorte de bout de monde, voilà ce que j'ai rencontré :

Pauvre vieille maison ! Quand as-tu été abandonnée ? pourquoi tes occupants sont-ils partis ? Et pourquoi personne n'est revenu chérir la maison de ses ancêtres ? Bientôt, tu disparaîtra dans l'indifférence générale.... Les terres fertiles qu'il y avait autour de toi ne servent plus à rien sinon à faire pousser des pins qui acidifient et appauvrissent le sol. Sol qui pourtant avait été patiemment travaillé et fertilisé par les occupants de ce lieu et ce, peut-être, depuis des temps immémoriaux...

Photos : Esclarmonde

   Le ciel gris que j'ai trouvé ce matin au lever s'est déchiré et a laissé place à une belle lumière dorée comme je les aime...

photo : Esclarmonde

"J'y suis allé une fois, Monsieur, dans un de ces centres commerciaux, parce que ça venait d'ouvrir, c'était une curiosité, à l'époque, voyez-vous. La musique vous y poursuit partout. Des chants martelés, des onomatopées de jouissance ou de douleur. Entre les morceaux de musique, des gens parlent, mais on ne comprend jamais ce qu'ils disent. Des publicités et des blagues, je suppose. C'est ce qui m'a surtout frappé, dans les voix de la radio qui me traquaient dans les galeries, l'ironie. Comme si on se moquait de moi personnellement. Une impression que j'ai souvent ressenti à Logres. C'est une ville monstrueuse, vous verrez (...) Je suis rentrée dans un magasin pour regarder quelques chemises. Dans les haut-parleurs, des choeurs de voix mâles scandaient des phrases où il était question de niquer, de salopes, de thunes. Le vendeur m'a reçu courtoisement, j'ai acheté une chemise à carreaux, nous nous sommes remerciés mutuellement tandis que les haut-parleurs hurlaient des ordures. En sortant, il m'a semblé que ce centre commercial, ces parkings, ces hangars à vêtements, tout ça était une farce. Nous étions dans la même ignominie, nous acceptions tout, la débauche des fringues à vendre et les saletés des radios, nous étions grotesques, des bouffons, comme disaient les groupes de gamins qui nous bousculaient et crachaient à nos pieds, et ils avaient raison".

Extrait de "Festins Secrets" de Pierre Jourde, éditions L'Esprit des Péninsules

centre commercial Plan de Campagne près de Marseille, le plus grand d'Europe paraît-il...

"Festins Secrets", sorti en 2005, est un roman où un narrateur mystérieux tutoie le personnage principal, Gilles Saurat, un jeune professeur qui prend son premier poste d'enseignant dans un collège "difficile" de la ville imaginaire de Logres. L'auteur, enseignant lui-même et ayant exercé plusieurs années dans des collèges de différentes régions de France, règle ses comptes avec l'Education Nationale et plus largement, contre la société française contemporaine. Ce roman, remarquablement écrit à mon goût, ce que je trouve rare par les temps qui courent, est volontairement noir et désespéré, nous vivons, selon lui, dans une société corrompue, où il faut avoir des relations pour réussir et si l'on est seuls, on est écrasés par une bureaucratie anonyme. L'amour est réduit à des actes sexuels narcissiques et personne, sous prétexte de politiquement correct, n'ose affronter et réprimer les voyous qui rendent le métier d'enseignant impossible. Jourde accuse une société qui met l'insignifiance et l'ignorance sur un piédestal. Pessimiste ? J'ai trouvé que ce roman est une mise-en-garde contre les dérives de notre société et la ville imaginaire de Logres est un condensé des travers de notre monde....

Un autre extrait :

"Je me suis perdue dans des procédures administratives interminables. J'y suis encore. Les administrations se renvoient la balle. Des années que ça dure. On m'ignore. C'est fantastique. C'est bien simple, je suis à Logres comme si je n'existais pas. Vous verrez vous aussi. On vous marche sur les pieds, on vous bouscule. On vous crache sous les nez. Personne ne paraît vous voir, personne vous parle. Quant à leurs maisons, monsieur, des huîtres. Chacune a un petit monde bien claquemuré. On y entre jamais. Ils ont leurs codes, leurs histoires, ils ont leurs confréries, leurs réseaux, et tout fonctionne comme ça. Vous ignorez toujours les causes réelles de ce qui vous arrive à Logres. Tout cela se décide dans des cercles auxquels nous n'avons pas accès. On croie y avoir accès, j'y ai cru. Mais c'est une illusion, ils vous leurrent sciemment. Plus on croie être dedans, plus on est dehors, loin du coeur, de là où ça se passe vraiment. Vous n'êtes pas des leurs."

Lundi, temps chaud, ciel bleu magnifique, puis un petit nuage blanc, puis deux, puis trois, puis des dizaines de nuages blancs. Ceux-ci grossissent, deviennent joufflus et gris au dessus de ma tête.... Puis sont irrésistiblement attiré par les montagnes où ils déversent leur trop plein d'eau... Moi, j'en suis quitte pour quelques goûtes... Apparaît un arc-en-ciel et le ciel se dégage laissant apparaître une magnifique lumière...

   Certaines personnes ne jurent que par le beau temps permanent, bleu immaculé de janvier à décembre, moi ça finit par m'ennuyer un peu... Et comme j'aime plutôt la verdure, il faut bien un peu de pluie pour faire pousser tout ça !

   Et cela peut donner de très belles photos !

   Quelque part dans les Hautes-Alpes (à quelques kilomètres de la Drôme) se trouve presque au bord d'une petite départementale, une ancienne ferme nommée "Toulaye". Elle est inhabitée depuis une cinquantaine d'années comme bon nombre d'anciennes fermes des Alpes du Sud, région qui a subit une forte émigration depuis des décennies. Généralement vers Marseille, Avignon, Grenoble... les grands centres urbains ou industriels. Depuis la fin des années 50, Toulaye est entretenue a minima, les volets sont repeints mais le toit est en piteux état. Je la trouve à peu près parfaite de part son style et son emplacement, dans un vallon préservé de l'urbanisation mais l'argent me fait défaut et les propriétaires, âpres au gain, en voulaient une fortune ! Pourtant ce n'est pas Saint-Tropez ou Antibes ! 

   Cependant, je me suis faite des films comme on dit, mes enfants courant dans l'immense espace autour, une ancienne grange reconvertie en grand séjour cuisine chaleureux, dommage d'ailleurs, je ne l'ai pas pu la prendre en photo cette grange car les propriétaires étaient là lorsque je suis revenue la voir dimanche dernier et je n'ai pas osé ouvrir la porte...

   Voici cette demeure vue du côté nord. Elle est en fait sur trois niveaux et est construite contre une pente comme souvent dans les Alpes. la pente servant très probablement à s'abriter le plus possible des vents du nord. Ici, au dernier étage était une grange, c'est ce niveau que j'aurais bien vu reconverti en séjour !

   Quant à cette magnifique jonquille, elle avait poussé juste devant l'entrée de la grange (la porte la plus petite sur la photo), on aurait dit qu'elle m'attendait ! Cela faisait déjà deux ans que je ne m'étais pas rendue là. J'ai vécu un certain temps au milieu d'un village où je ne plaisais pas du tout, peu d'espace, endroit désagréable et bruyant et j'ai longtemps fantasmé sur Toulaye !

   Cette terrasse se trouve sur le côté est de la maison, au deuxième niveau où se trouvait la partie habitation de la ferme. Elle est ensoleillée le matin. Parfois, avec Patrice, mon copain, on venait planter notre tente près de la maison et le matin, on prenait notre petit déjeuner sur cette terrasse, c'était très agréable !

   Du côté est, un jardinet abrité des vents du nord et sur la gauche, se trouve un bâtiment tout en longueur attenant à la ferme qui abritait très probablement une porcherie et un poulailler. Je l'aurais bien vu reconverti en bloc sanitaire pour le camping ! Pourquoi pas avec un petit dortoir attenant pour un gîte "à motards" (Patrice est fan de moto) ?!

   Une belle cave parfaite pour stocker des bonnes bouteilles de vin et des patates ! L'absence de patates chez nous est vue comme une vraie tragédie ! De plus, on aurait pu en faire pousser dans un champ alentour...

   Voici la maison du côté sud, un jardin juste devant et des champs...

   Vue sud sur l'ancienne porcherie et la vieille fontaine qui date de 1927 mais qui ne coule plus. Une source à vingt mètres au dessus aurait pu servir à la refaire marcher...

   Et tout en bas du chemin qui part de la maison et qui passe à travers champ, voici ce qu'on peut trouver....

   Au delà de mes petits rêves, dommage que cette ferme se dégrade petit à petit, sera-t-elle occupée un jour de nouveau ? C'est ce que je souhaite.