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Le complot de la famine (2)
A l'époque où le mildiou apparaît pour la première fois en Irlande en 1845, le Royaume Uni est gouverné par un Premier Ministre Conservateur, Sir Robert Peel qui, bien qu'il méprise les Irlandais, prend quelques mesures comme celle de réunir une équipe de chercheurs pour lutter contre le mildiou et d'acheter aux américains - au nez et à la barbe de son parlement hostile à cette idée - un gros stock de maïs qui sera livré en Irlande pour faire baisser le prix des céréales pour le rendre accessible aux habitants. Mais peu de temps après, il est remplacé par un nouveau Premier Ministre du parti libéral, Lord John Russel qui aura à gérer cette crise humanitaire qui coïncide avec son passage au 10 Downing Street.
Pour ajouter aux malheurs des Irlandais, Daniel O'Connell, l'une des grandes figures de l'histoire de l'Irlande, qui avait réussi à faire abroger les lois pénales qui privaient les catholiques de nombreux droits et qui luttait à la fin de sa vie pour l'abrogation de l'Acte Union, décède en 1847, au début de la Famine. Il avait bien sûr alerté depuis des années le gouvernement de Londres sur la situation sanitaire et sociale de son pays, sans grands résultats.
Daniel O'Connell
En plus de la livraison de maïs, il a été décidé également d'ouvrir en Irlande des Workhouses, sorte d'asile pour les indigents qui existaient depuis quelques décennies en Angleterre, on s'arrangeait pour que les conditions de vie dans ces endroits soient les plus indignes possibles afin d'être sûrs que ce soit l'ultime solution pour les pauvres... De plus, étant conçus pour les villes industrielles anglaises, ils ne répondaient pas aux réalités d'une Irlande rurale. Dans les régions où la famine et la misère frappaient le plus, ces établissements étaient rares et pris d'assaut ce qui entraîna une promiscuité qui favorisaient le développement de maladies liées à la famine et la misère comme le typhus ou des fièvres souvent mortelles, les enfants souvent livrés à eux même en étaient les principales victimes.
Une autre décision a été d'ouvrir des chantiers publics pour construire de nouvelles routes et d'embaucher des paysans dans le dénuement mais le salaire qu'il leur était versé était à peine suffisant pour survivre. De plus, ils étaient le plus souvent dans un grand état de faiblesse à cause du manque de nourriture et avaient le plus grand mal à travailler correctement.... Dans un contexte de bureaucratie inefficace et de corruption, les travaux commençaient souvent des mois après la première décision prise et les tracés étaient souvent absurdes, les routes finissant souvent dans une zone inhabitée de landes et de tourbières...
Une des workhouses qui avaient été construites en Irlande
Mais tout aussi médiocres que furent ces mesures gouvernementales, elles auraient permises néanmoins à des gens de survivre. Or, le gouvernement de Lord John Russel, nommé en 1847 était idéologiquement lié au principe du "laissez faire", c'est à dire par la non intervention de l'état, l'intérêt bien compris de chacun étant supposé palier à tous les problèmes et le plus fervent défenseur de cette doctrine était Charles Trevelyan, un haut fonctionnaire qui était en charge de l'Irlande. De plus, il avait de nombreux préjugés envers les Irlandais et le clergé catholique, accusés de comploter contre le pouvoir central de Londres.
De plus, l'aristocratie anglo-irlandaise avait comme projet de moderniser leurs terres et de développer des cultures spécialisées et de grandes zones d'élevage. Mais la présence de petits laboureurs étaient une gêne dans leur projet.
Ces derniers, sans pommes de terre pour survivre, avaient été obligés de dépenser leurs maigres ressources pour se nourrir mais du coup, ne pouvaient plus payer leurs loyers. On a par conséquent assisté à de nombreuses expulsions, faites généralement de façon cruelle, souvent en plein hiver. Les gens étaient chassés de leurs maisons qu'on s'empressaient de détruire juste après. Et quand ces malheureux ne mourraient pas de faim ou de froid, ils choisissaient le chemin de l'exil.
On estime qu'environ 1,5 millions de personnes ont quitté le pays, le plus souvent pour les Etats Unis mais aussi le Canada La traversée de l'Atlantique se faisait dans des conditions épouvantables et nombreux étaient les gens qui mourraient en route ou peu de temps après avoir accosté en Amérique.
(fin de la deuxième partie)
Tags : irlande, grande famine, XIXe siècle, ère victorienne, workhouses, exil, libéralisme
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Commentaires
1LaretJeudi 27 Août 2015 à 09:38IIls étaient déjà des "migrants".....Bises et bonne journée, Jean-PierreRépondretu nous racontes là une histoire bien cruelle
au point qu'on a presque du mal à y croire
et pourtant...
le monde tourne et toujours des gens qui sont obligés de quitter leur pays .. c'est bien malheureux. Bises
Merci d'avoir lu et apprécié, c'est vrai que cette tragédie en rappellent malheureusement d'autres bien actuelles.
Passez un bon week-end
Bises
au 19ème siècle, français, belges et allemands exploitaient surtout les noirs. Les anglais, plus égalitaires, exploitaient (et voudraient bien toujours exploiter) tout ceux qui n'étaient pas ... anglais. bonne journée !!
Bonjour Peache, fait peu connu, y compris par les Irlandais eux même, a été la déportation de milliers d'habitants de l'Ile verte vers les colonies britanniques aux Antilles comme esclaves, puis ils ont été remplacés par des Africains, plus résistants à la chaleur... Comme quoi, l'exploitation de l'homme par l'homme n'est pas forcément une histoire de couleur de peau. Je te souhaite une belle journée,
Bonjour esclarmonde, j'ai découvert ton commentaire chez Peache dont j'apprécie l'écriture et ai été touchée par ta façon de "dire" les choses"...
Pas le temps là de lire tes écrits mais ce soir je reviendrai! Je te mets dans mes liens, ainsi ce sera plus facile.
Amicalement.
Anne
J'ai visité ce bagne à l'île de pins... Je n'oublierai jamais.
@ Eymeraude Si je ne me trompe pas, c'est le bagne ou a été enfermée Louise Michel entre autres... Sinon merci beaucoup pour votre visite, vous êtes la bienvenue et d'ici là j'espère que j'aurais trouvé le courage pour être la suite et la fin du résumé de ce livre sur la famine irlandaise. Amicalement Esclarmonde ps : j'irai aussi vous rendre visite
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