"Après le rude hiver 1956, on vit apparaître le squelette des oliviers. Jusque là, ils avaient été grecs de la belle époque ; brusquement, ils s'étaient dépaysé, ils avaient voyagé dans le temps et dans l'espace jusqu'à la brutalité et la sauvagerie des totems, ils couvraient désormais les collines de diagrammes rituels. Ce que les poètes avaient fait du chevalier, de la dame, du moine, du roi, du pape, de l'empereur du Moyen-Âge dans les danses macabres, le gel l'avait fait avec les arbres, et surtout avec les arbres éternels."

Jean Giono

Oliviers des Alpilles gelés après la grande vague de froid de 1956

Toile d'Antoine Serra 

   Après avoir évoqué la période de gel intense de février 1956 dans mon article "Retour de l'hiver", je reviens sur les oliviers qui avaient cruellement souffert cet hiver-là  au point de périr par milliers. Pourtant certains avec plusieurs centaines d'années. On estime que un million d'oliviers ont péri et cinq millions ont du être abattu.

   L'olivier, arbre typiquement méditerranéen, peut en fait supporter des gels assez forts mais ceux-ci ne doivent pas être de trop longue durée. De plus, cet arbre supporte mal l'humidité durable. En 1709, une grande mortalité des oliviers fut constatée car le gel avait suivi un mois de décembre particulièrement pluvieux. De plus, le froid de 1956 est arrivé avec une brutalité exceptionnelle. D'un jour à l'autre, on est passé d'un mois de janvier particulièrement doux à un froid sibérien.

un survivant de cet hiver 1956

    Cette brutalité dans la chute des températures a été aussi une cause de la mort des oliviers. De plus, la première partie d'hiver avait été tellement douce (encore plus que cette année semble-til )que la sève était montée dans les arbres et lorsque le gel est arrivé, les arbres ont éclaté par milliers. Pas seulement les oliviers d'ailleurs, je me souviens bien d'un épisode de la "saga" paysanne de Claude Michelet, "Les palombes ne passeront plus", se déroulant en Limousin. Dans cet épisode, le grand froid de 1956 arrive et fait périr bon nombre d'arbres qui éclatent également.

   L'olivier a une aire de répartition très précise du à ses "exigences" particulières en matière climatique.

   Là où j'habite (à 20 kms au nord de Digne-les-Bains), on ne trouve pas d'oliviers car le climat est trop montagnard et les hivers rudes bien que je vive assez sud du point de vue de la latitude. Par contre, ils se plaisent dans le climat bien protégé de Nyons dans la Drôme où l'on produit une huile d'olive très côtée et c'est un peu plus nord que chez moi...

   Quand on remonte la vallée de la Durance jusqu'à Sisteron, les oliviers nous accompagnent mais dès qu'on passe la clue de Sisteron qui marque à peu près la limite entre les Alpes-de-Haute-Provence et les Hautes-Alpes, l'olivier disparait d'un coup !

   Autrefois, cet endroit marquait la limite entre Provence et Dauphiné...

   Une nouvelle mode veut qu'on plante des oliviers un peu partout en France pourtant je doute qu'il supporte un climat trop humide ou peu ensoleillé... Comme on ne trouve ni bouleau ni sapin dans les chaudes plaines provençales car ils ne supporteraient pas la grosse chaleur estivale...

Beaucoup d'oliviers "expatriés" restent dans un pot pour pouvoir être abrités l'hiver.   

On estime que 80% des oliviers provençaux ont péri en 1956 (et je suppose que la proportion doit être similaire en Languedoc-Roussillon et en Corse). A l'époque, on avait préféré planter des vignes à la place car leur culture était très rentable. Mais depuis quelques années,  l'olivier est très à la mode à cause des vertus diététiques de son huile et ces arbres sont devenus chers au point qu'il y a des vols d'oliviers dans les champs !.... En tout cas, le nombre d'oliviers tend à croitre bien que la production française d'huile d'olive soit très insuffisante pour couvrir les besoins de l'Hexagone, et l'huile d'olive que nous consommons généralement est originaire d'Espagne ou d'Italie.